Combien de fois vous êtes-vous retrouvée à vous dire, quelques mois après avoir été embauchée, « Pourquoi ai-je accepté ce salaire? »
Dernier entretien de recrutement pour un client pour un poste d’assistant-e administratif : je reçois une femme d’une quarantaine d’années. Expérimentée, formée, avec une présentation claire et de bons arguments. Evidemment, pour moi qui suis rompue dans mes accompagnements à donner des conseils en gestion de carrière sur la manière de se « proposer » en entretien et de négocier son salaire, je suis à chaque fois en attente du moment magique dans lequel on arrive au fatidique « quelles sont vos prétentions? ».
Cette fois encore, je n’ai pas été déçue! Voici les réponses:
Je ne sais pas trop, je n’ai pas tellement d’idée du marché
Je veux juste un salaire équivalent à ce que j’avais avant
Je n’ai pas de gros besoins
Plusieurs mots sont à rayer ici. La première phrase nous donne une indication: soit la personne n’a effectivement pas fait de recherches sur les salaires pratiqués dans la région et le type d’entreprise dans lequel elle postule (étonnant, mais admettons), soit elle n’ose pas annoncer un chiffre ou une tranche. Je penche pour la deuxième option. Deuxième phrase, le mot « juste ». Un peu comme si vous disiez « je veux juste avoir le droit de travailler » ou pire « donnez-moi ma chance », expression bien connue des chefs d’entreprises paternalistes, qui veulent vous rendre redevables pour les siècles des siècles de vous avoir embauché-e.
Savez-vous combien vous valez?
Femmes, Femmes, Femmes…Quand aurez-vous enfin conscience du fait que vous devez connaître votre valeur? Premier commandement, et croyez-moi il ne sort pas de Marie-Claire mais bien d’une vraie réflexion éprouvée par des centaines d’expériences: vous devez aller chercher quelle est votre réelle valeur sur le marché: financière, de compétences, d’expériences, de potentialités à offrir. Il y aura un travail de fond de recherche et de synthèse à réaliser.
Le recrutement est (ou devrait être) un échange
Deuxième commandement: vous êtes en entretien de recrutement dans un échange. Il n’y a pas d’examen, vous ne jouez pas votre vie et l’entreprise n’a pas de pouvoir suprême. Son seul tort, le plus souvent, est de vouloir se vendre absolument et donc de raconter n’importe quoi : « Notre entreprise est exceptionnelle, nos employés sont heureux ». La vérité, c’est que dans chaque entreprise il y a des gens heureux et d’autres qui ne rêvent que de partir. Ca s’appelle la vie. Vous, abreuvée des conseils de votre entourage depuis 6 mois que vous cherchez, devenez franchement morte de faim. La moindre opportunité constitue la « chance de votre vie » et votre perception crée une réalité construite par l’urgence de votre situation.
Le problème, c’est que lorsque l’on a très faim, on vend mal. Et à bas prix.
Essayez donc autant que possible de regarder la situation de manière rationnelle. Je vous suggère de dire clairement ce que vous souhaitez, ce avec quoi vous pouvez vivre et ce avec quoi vous ne pourrez pas vivre. L’entreprise, elle, pourra vous dire si oui ou non elle peut accéder à vos besoins. Point. Ce n’est pas très compliqué, mais la surenchère permanente des uns et des autres ces dernières années met toutes les parties dans des situations impossibles dans lesquelles manque de clarté et de simplicité, génèrent des situations conflictuelles.
Un salaire se négocie et se discute
Voici quelques conseils pour négocier votre salaire sans sortir de l’entretien déprimée ou dévaluée.
- Avant l’entretien, renseignez-vous sur les salaires pratiqués dans votre région/pays/secteur d’activité, que ce soit dans le privé ou le public. En Suisse vous aurez l’excellent Salarium. En France, vous pourrez consulter des forums et certaines plateformes d’emploi proposant des fourchettes (souvent trop basses) de salaire pour le poste (Apec). LinkedIn aussi fournit des indications à conditions d’utiliser l’abonnement Premium pour lequel vous pouvez souvent avoir un mois d’essai gratuit.
- Regardez sur Linkedin les profils correspondant au vôtre dans la même région et faites-vous une idée des formations et compétences affichées pour voir le delta existant entre ces profils et le vôtre. Contactez directement les personnes au besoin pour recueillir des informations.
- Une fois votre idée faite, établissez vos besoins et frais mensuels puis définissez un salaire correct correspondant. Ajoutez une marge confortable pour vos loisirs et les imprévus.
- Préparez mentalement un montant en dessous duquel vous n’irez pas. Définissez une fourchette haute mais raisonnable au regard de ce que vous avez constaté dans vos recherches. Au pire, vous devrez redescendre mais resterez dans vos frais.
Demandez puis taisez-vous
Généralement, le premier à parler de salaire a perdu. Lorsque l’entreprise vous demandera vos prétentions, retournez la question: demandez ce qui a été prévu, ce qui se pratique dans l’entreprise à poste et compétences égaux. Ne parlez plus, mais faites parler. Si malgré cela vous vous retrouvez dos au mur, vous aurez toujours votre fourchette à annoncer qui vous permettra de retomber sur vos pattes
Connais-toi toi-même
Que vous n’ayez pas travaillé depuis longtemps ou que vous manquiez de confiance en vous, la clef sera de vous préparer, de manière pragmatique et avec des arguments solides. Pour ne plus, encore, vivre la situation dans laquelle vous avez l’impression de vous être fait avoir. Sans connaissance de vous-même, de votre parcours, des candidatures « concurrentes », du marché et de votre valeur, vous ne valez rien. Bien sûr de manière intrinsèque vous êtes formidable… mais que valez-vous sur le marché? le savez-vous ? C’est important d’être au clair avec cela, car cela vous donne une idée précise de votre marge de manoeuvre et également l’assurance indispensable pour définir un objectif ambitieux: le vôtre. Celui qui vous permettra en obtenant le poste, de vous mesurer à des challenges stimulants car vous vous sentirez à la bonne place, avec le bon salaire.